Le TRAGER dans l'aide à l'arrêt de drogue

janvier 1997, Bernard DELILLE, éducateur spécialisé, praticien TRAGER
 
Avertissement: Chaque personne, chaque histoire  est unique. Les inévitables généralisations qui suivent sont destinées uniquement à illustrer les apports du TRAGER ; elles ne visent en aucun cas à dresser un portrait type des personnes ayant utilisé des drogues.
 
 
L'arrêt de drogue
Lorsqu’une personne décide d’arrêter la consommation d’une drogue dont elle est dépendante, elle doit affronter des difficultés majeures :
Bien souvent elle a recouru à cette drogue pour tenter de soigner des problèmes qui n’ont pas disparu. C’est souvent un champ de ruines qu’il faut reconstruire. L’arrêt de consommation plonge dans le désarroi au moment même où il faudrait un maximum de dynamisme. D’où la tentation de reconsommer, remède garanti à court terme pour échapper à toutes ses difficultés.
 
Il y a plusieurs façons d’arrêter une drogue qui varient selon le produit, la personne, le mode, les médecins…
Sevrage (désaccoutumance physique pénible pendant une semaine), puis réaménagement de sa vie : long sevrage dit « psychologique ».
Recours à un produit de substitution prescrit par un médecin (suppression du manque, du plaisir, vie régulière, mais dépendance au produit et au prescripteur), puis sevrage psychologique et enfin sevrage du produit de substitution.
 
Toute personne qui arrête une drogue a donc besoin de soutien.
 
Les médicaments sont très demandés, très proposés, à la longue le danger est de troquer une toxicomanie contre une autre.
 
La psychothérapie apporte des résultats dans le long terme mais elle est souvent rejetée, dans un premier temps, par les toxicomanes. Il est en effet difficile de se poser la question : « en quoi suis-je pour quelque chose dans ce qui m’arrive ? … alors que je fonctionne depuis si longtemps dans la fuite, l’évitement du langage ».
 
En général, dès la période d’abstinence engagée (avec ou sans produit de substitution), les toxicomanes, toujours en recherche de sensations nouvelles, accueillent favorablement l’idée d’entreprendre un travail corporel. Tout l’art va consister à passer de la recherche  de sensations fortes à la découverte de sensations subtiles, du corporel au psycho-corporel … réconcilier le corps et l’esprit en un être cohérent.
 
L’apport du Trager.
Au Québec et en France, des praticiens Trager intervenant dans des centres de soins aux  toxicomanes, on adapté, développé cette approche. Elle vient en préalable en complément ou à la suite des autres outils de soins.
Pratiqué individuellement, avec le praticien ou en groupe, le Trager a montré son efficacité dans l’aide aux personnes abstinentes ou sous produits de substitution pour retrouver un équilibre de vie. Travail sur tables et les Mentastics sont proposés.
 
D’abord, lutter contre la dépression.
Passées les douleurs de sevrage ou l’enthousiasme du début de traitement de substitution, c’est la dépression qui guette la personne : envie de rien, vide d’énergie, sentiment d’inutilité, découragement par la prise de conscience des dégâts causés par la toxicomanie, perte des repères habituels construits au fil des années autour de la recherche de produit. Les amis toxicomanes ne sont plus fréquentables, les autres ont tourné les talons, la famille n’en peut plus ou, inquiète, guette la rechute.
Dans une séance de Trager, le praticien donne toute son attention, son écoute par une présence et une qualité de toucher qui atteignent le corps et l’esprit. Il accueille les réactions de la personne sans juger. Cette relation humaine profonde lui redonne de l’importance, la réconforte. Elle permet de rompre un moment avec la relation de rejet, de méfiance, que le toxicomane a construite autour de lui. Plus encore parfois que dans un contact verbal, il se sent écouté.

La baisse de stress, le relâchement physique et mental font diminuer l’envie irrépressible de consommer de la drogue.

Retrouver le sommeil, les rêves.
La perte de sommeil est l’un des obstacles majeurs à l’arrêt de drogue. Nombre de patients déclarent, à la suite d’une séance de Trager : « Cette nuit, j’ai dormi comme un bébé ! ». Même si les insomnies peuvent revenir par la suite, cela prouve qu’il est à nouveau possible de dormir et de rêver sans produit et ouvre un espoir considérable.

Retrouver sensations, émotions, langage.
Les années de toxicomanie amenuisent les effets des drogues, exigeant des doses de plus en plus fortes pour des effets de moins en moins probants. A la longue, le toxicomane ne perçoit plus son corps que douloureux ou anesthésié.
 
Dans le même temps, l’entourage remarque que les promesses du toxicomane sont vaines, ses mots ne l’engagent plus à rien. Il veut tout, tout de suite. Le langage se réduit au silence ou à la violence.
Les mouvements du Trager font progressivement ressentir le poids, la mobilité, les nuances, des sensations de plus en plus fines. On observe la richesse toute particulière des réactions des participants ; leur joie, leur surprise, leur trouble aussi de redécouvrir tout cela par leurs propres ressources : des émotions surgissent. La personne est invitée à donner un mot, une image pour découvrir, représenter, partager avec le praticien ou le groupe.
Peu à peu, sensations, émotions s’accordent à un langage verbal et non plus à un produit qui manque (douleur, violence) ou qui submerge (anesthésie, silence).
 
Accepter sa nouvelle image.
Lorsqu’un toxicomane arrêt la drogue,  les changements vus de l’extérieur sont spectaculaires et rapides : il reprend du poids, soigne sa présentation,  fait refaire ses dents (ce qui modifie son visage). De l’intérieur, cette image nouvelle peut déstabiliser la personne encore fragile. La nouvelle posture liée au poids, la nouvelle dentition entraînent des douleurs. Le regard des autres sur soi a changé, c’est troublant.
Le Trager, tout en contribuant lui-même à ce changement, accompagne la personne en l’aidant à jouer avec ses nouvelles perceptions, à les apprivoiser. Il participe à retrouver l’estime de soi, nécessaire pour rompre l’isolement affectif.

Retrouver le plaisir de bouger.
Beaucoup de personnes abstinentes sont tentées par la reprise intensive d’un sport sur un mode de souffrance, d’expiation… de « défonce ». Leur état de santé le leur permet rarement ; c’est alors une nouvelle occasion d’échec.
La pratique conjointe du Trager et d’un sport les invite à s’y engager sur un mode de plaisir. L’expérience du « lâcher prise » telle que la propose le Trager aide les personnes fonctionnant dans la maîtrise, le défi, à retrouver une meilleures utilisation de leur énergie (c’est souvent le cas des amateurs de produits stimulants). Dans une séance de Trager, la question : comment c’est ? Comment ce pourrait être ? Les personnes découvrent un meilleur contrôle de leur corps et de leurs émotions. Combien de patients disent : « Je me drogue pour me donner du courage » ou « Je me drogue pour me calmer ».
 
Reprendre en compte sa santé.
Les toxicomanes en activité négligent leur santé, captés par l’unique préoccupation du produit. Selon les drogues et les pratiques, les dégâts sont plus ou moins importants.
Un des premiers résultats du Trager chez les personnes abstinentes est le désir de prendre soin d’elles-mêmes. Elles deviennent actrices de leur santé, le plus souvent avec l’aide d’un médecin. Cette responsabilisation est probablement l’apport le plus précieux du Trager dans ce domaine.
Sur un plan plus physiologique, il apporte des améliorations (en complément des soins médicaux) :
Pour les problèmes de circulation sanguine liés à la détérioration des veines (à la suite des injections répétées).
Pour certaines insensibilités locales ou paralysies consécutives à des traumatismes ou arrêt de circulation dans certains membres lors de comas.
Pour les problèmes respiratoires dus à des maladies, des accidents, des inhibitions.
Pour renforcer le systèmes immunitaire des personnes atteintes par le VIH (baisse du stress, réconfort moral).

Prendre conscience de son corps, relâcher les tensions, en éprouver du plaisir, c’est aussi l’aider à mieux fonctionner.

Retrouver un équilibre de vie à long terme.
Toutes ces expériences ponctuelles : le lâcher prise, la mobilité, l’unité du corps…, sont proposées – jamais imposées -  par le Trager dans le cadre sécurisant mais momentané de la séance.
Ressenties dans le corps, elles atteignent l’inconscient et prennent place dans la mémoire corporelle, à côté et en équilibrage des traumatismes passés.
Cela explique les effets cumulatifs et durables des séances, même si elles s’espacent. Les sensations ses remémorent facilement à l’aide des Mentastics et affinent les gestes quotidiens. Au cours de son long parcours pour réaménager sa vie, la personne abstinente garde à sa disposition ces expériences, en mémoire dans le corps même si en apparence elles ont été oubliées. En général, le patient est invité à expérimenter lui-même les Mentastiques dans sa vie quotidienne d’abord lorsque ça va bien. Puis, avec un peu d’entraînement, il y recourt dans les moments difficiles : colère, découragement, insomnie, envie de reconsommer.
Mais, comme toute découverte ou redécouverte, il faut du temps pour qu’elle trouve sa place dans l’histoire, le tempérament, la psychologie de  la personne. Cela provoque des émotions, parfois des conflits intérieurs. Il n’est pas toujours simple de lâcher, de sentir la liberté, de réveiller des souvenirs tapis dans le corps. Un soutien peut être nécessaire.

Trager et psychothérapie
Comme nous l’avons vu, les personnes ayant eu recours aux drogues ont un rapport particulier au langage, souvent très lointain de la réalité qu’elles vivent. Par les émotions qu’il évoque, les expériences ressenties – non plus imaginées – qu’il procure, le Trager enrichit le travail de psychothérapie lorsqu’il est engagé (avec un autre intervenant) ou permet à des patients à l’entreprendre.
 
Reprendre son chemin.
L’approche Trager fonctionne en définitive comme l’éducation : elle propose à l’être en croissance d’intérioriser ses expériences jusqu’à parvenir à une connaissance intuitive suffisante de lui-même et du monde pour s’y mouvoir avec aisance.
 
 
 

 
 
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