Effets constatés chez les toxicomanes :
Quelle que soit la technique employée, un certain nombre d'effets
de l'approche corporelle ont été constatés de façon
générale par les patients et les thérapeutes :- Baisse
du stress.- Baisse du "craving" (envie de consommer des toxiques, lié
au manque psychologique).- Aide à l'abstinence.- Amélioration
du sommeil (durée et réapparition des rêves).- Réconfort
psychique principalement pour les personnes privées de relations
humaines.- Amélioration de l'image de soi".
"Dans la plupart des cas, l'investissement des patients dans un travail
corporel s'accompagne d'un ensemble de démarches d'amélioration
des conditions de vie (santé, environnement social, équilibre
psychologique). En fait c'est un processus de réhabilitation qui
s'enclenche, même si l'on n'en connaît pas toujours l'élément
de départ. L'approche corporelle... est moins sujette que d'autres
approches (la parole par exemple) aux paramètres culturels (la langue),
sociologiques (la classe sociale), intellectuels (la faculté d'abstraire,
d'élaborer dans le langage parlé). L'approche corporelle
n'est pas fondée sur le discours verbal (utilisé parfois
juste pour illustrer). La relation interpersonnelle qui la supporte est
pourtant inscrite dans un langage (cadre, gestes, technique, rituels).
Elle a pu également faciliter l'accès de patients à
la psychothérapie et aux soins médicaux."
Le mouvement
"Le Trager fait souvent appel à la mobilité comme base
d'expérience du ressenti : "Comment mon bras bouge-t-il, quel chemin
tel mouvement emprunte-t-il dans mon corps ?" Cette mobilité est
parfois un élément rassurant pour des patients qui redoutent
l'immobilité de certaines techniques de relaxation. Il arrive au
contraire que le mouvement soit un élément angoissant (rappel
du bercement, peur du vide...) ; il est alors possible de le limiter ou
même de recourir à d'autres bases de ressenti (étirements,
compressions...). La mobilité propose à la personne des expériences
de légèreté, de souplesse, de liberté, de sécurité.
Enfin, parce qu'il est rythmé, le mouvement met en scène
le temps. Le rythme concerne aussi bien la succession des gestes exécutés
dans une même séance que la succession des séances
elles mêmes dont les effets sont cumulatifs. Il est donc proposé
au patient des repères qui matérialisent leur progression
tout en s'intéressant à ce qui se passe ici et maintenant.
Tout cela est en rupture avec l'économie du "tout, tout de suite"
contenue dans la toxicomanie."
Le respect des résistances, l'exploration
"Il n'est jamais question de forcer, d'outrepasser les limites psychiques
ou physiques de chacun; on évite toute attitude de défi,
de maîtrise, la question n'est pas de réussir ou d'échouer
tel ou tel mouvement mais d'observer : "comment c'est ?" et d'explorer
"comment ce pourrait être ?" "quelles sont mes limites aujourd'hui,
mes possibilités"? Là, nous sortons de la dialectique du
"tout ou rien". Les patients découvrent parfois que c'est en lâchant
prise que l'on retrouve le contrôle de son corps et de ses émotions
; non plus une maîtrise réactionnelle de défense ou
de peur, mais une maîtrise sereine..."
Intégration psycho-corporelle
"Dans l'idée des personnes en démarche d'abstinence,
et de leur entourage, tout est en général affaire de volonté
dans un combat entre l'envie qui viendrait du corps : et le vouloir produit
par l'esprit. Dans l'approche Trager il n'est pas question de lutte de
l'esprit contre le corps mais d'intégration: harmoniser l'un avec
l'autre. Il suffit d'avoir approché des toxicomanes en démarche
de soin pour constater que leur "guérison" ne peut survenir qu'à
la condition d'avoir retrouvé un apaisement, un équilibre
intérieur qui rende l'usage de toxiques superflu. Ce n'est jamais
à long terme le résultat d'un "bras de fer" entre l'envie
et la volonté. Pourtant, sortir de la toxicomanie réclame
une grande énergie pour surmonter la dépression qui succède
au sevrage, énergie de l'esprit conjuguée (et non opposée)
à celle du corps."
Contre-indications
"...la pratique du Trager auprès des toxicomanes a pu mettre
en évidence certains cas ou des précautions s'imposent:
a) Compte tenu de la population accueillie, il convient d'être
vigilant sur la question de l'état de conscience des patients notamment
avant le travail sur table.
b) La relaxation contenue dans le Trager peut apporter (au début)
des sensations qui rappellent les effets de certains toxiques ou médicaments
: sentiment de "partir". On évitera de pratiquer le Trager avec
des personnes dont l'unique souci serait de rechercher ces effets qui,
par association mentale pourraient pousser à la reprise de toxiques.
c) Le Trager en séance individuelle n'est à priori pas
une bonne indication pour des personnes trop centrées sur elles
mêmes, qui seraient en permanence dans "l'écoute de soi".
Il constituerait alors un enfermement plutôt qu'une ouverture. Dans
ce cas le travail de groupe, s'il est accepté, peut présenter
un intérêt particulier."
Conclusion
"L'expérience québécoise confirme les hypothèses
qui ont conduit des intervenants en toxicomanie à proposer, à
des époques différentes, en des lieux différents,
le Trager aux toxicomanes en démarche d'abstinence ou sous substitution.
Il trouve sa place dans l'aide à la sortie de la toxicomanie en
mettant en scène une grande partie des questions soulevées
par la prise et l'arrêt des toxiques: ressenti du corps, rapport
corps/esprit, place des émotions, image de soi, rapport au temps,
rapport à autrui, la santé.
Il propose, par sa pratique, de traiter ces questions par un rééquilibrage
interne du potentiel physique et psychique et non par l'apport d'une substance
"miraculeuse". Il peut s'harmoniser aussi bien avec le soin médical
que la psychothérapie par l'apport original et complémentaire
qu'il représente. "
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